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Nelrine

La mémoire est une faculté qui oublie... Mais pour quelle raison aies-je perdu une partie de la mienne, je l'ignore... Je n'ai aucun souvenirs de mes origines elfiques et je ne connais pas mon âge exact. Tous les souvenirs que j'aie, je les ai vécu parmi les humains, depuis maintenant près de 1 115 ans. Tout ce que j'ai conservé de cette époque oubliée est une clef que je porte autour de mon cou et une marque à la cheville gauche.
Je me souviens d'une fuite et d'une longue route à pied dans les bois. J'étais avec un homme qui se disait un ami de ma famille. Il me confia à des habitants d'un village humain que nous avons rencontré sur notre chemin. Je grandis avec eux sous une identité qui m'est toujours inconnue. Ils m'appelaient seulement Nelrine; l'homme qui m'avait confié à eux ne leur en avait pas dit davantage. Je n'ai plus jamais revu cet homme d'ailleurs… Il était si gentil… J'ai passé plusieurs années avec eux et, me sentant un peu à l'écart avec mes oreilles effilées, je fis le choix de les cacher aux yeux des autres. Ainsi, je n'avais pas à répondre constamment aux questions concernant mes origines dont je n'avais aucun souvenirs. Étant donné que j'étais la seule elfe, je perdis également la compréhension de cette langue pour n'utiliser que le commun.
Un jour, après plusieurs années, j'entendis des rumeurs concernant un vieil homme vivant dans la forêt en bordure du village. Personne ne connaissait cependant le lieu de son refuge; il planait un mystère sur cet homme de la forêt que je voulus absolument découvrir. Je décidai donc de partir à la recherche de cet homme, aventure qui fut beaucoup plus longue que je n'eus cru au départ. La forêt était immense et j'eus beau en faire le tour plusieurs fois, je ne le trouvai pas. Au fil des ans, j'appris à vivre de ce que la forêt pouvait m'offrir; je me familiarisais avec les différentes plantes, j'apprivoisais quelques petits animaux et je savais reconnaître certains arbres. J'appris à observer la nature, à la comprendre et, un soir, alors que j'étais assise dans l'herbe sous les étoiles, je fis le serment solennel de vouer ma vie à la protection de la nature.
Le lendemain matin, je me réveillai trempée par la rosée. Je m'étais endormie sur l'herbe et j'avais fait un rêve étrange. Je m'apprêtais à me lever quand je vis une main tendue vers moi. Je levai la tête et je le vis, celui que je cherchais depuis si longtemps. Il était si majestueux avec sa longue barbe grise et ses cheveux de la même couleur muni d'un chapeau troué trop grand pour lui. Sa toge était usée à force de frôler le sol et son visage laissait paraître un âge avancé. Il se tenait debout devant moi, une main sur son bâton et l'autre tendue vers moi pour m'aider à me relever. Tout ce qu'il me dit alors est : " Suis-moi Nelrine. " et je ne sus quoi dire durant tout le trajet. Après un instant, je vis une modeste cabane à même les arbres et il me fit signe d'y entrer. Pendant toutes ces longues années de recherche, je n'avais jamais remarqué ce refuge et, maintenant, je le voyais parfaitement bien. Il me raconta la première fois où il m'avait aperçue dans la forêt. Il m'avait ensuite observée longuement, en silence. Il avait remarqué mon amitié avec les animaux et ma passion pour la nature. Il avait attendu tout ce temps le moment où je serais vraiment prête à consacrer ma vie à la nature.
J'ai vécu plusieurs années auprès de lui. Il m'enseigna tous les secrets de la forêt que j'ignorais encore afin de faire de moi une druide au même titre que lui. Il m'apprit à reconnaître les herbes nécessaires pour concocter différentes potions et pour guérir les blessures. Il m'apprit aussi à me camoufler dans la nature et il m'enseigna les secrets de la divination. Je progressais de plus en plus chaque jour et ma vie prenait soudain tout son sens. J'étais tellement concentrée sur mon apprentissage que je ne remarquai pas son état de santé qui s'aggravait avant qu'il m'annonce qu'il allait bientôt mourir. Il me semblait impossible qu'un homme de son envergure puisse quitter ce monde. Mes yeux d'élève m'avaient caché son air fatigué et c'est d'ailleurs ce qu'il voulait jusqu'à ce jour. Il me fit entrer dans sa chambre et me dit : " Nelrine, je t'ai enseigné toutes mes connaissances, tu peux maintenant te considérer réellement comme une druide et remplir le serment que tu as fait dans cette forêt, il y a de cela plusieurs années. Surtout, garde foi en la nature et n'oublie pas qu'il s'agit du cœur de la vie. " Après une pause, il continua : " J'aimerais que tu me rendes un service Nelrine, un geste très important pour moi. " Il ouvrit une petite pochette de tissu rouge et il en sortit un gland. " Lorsque je mourrai, mon âme sera transférée dans ce gland pour y trouver le repos éternel. Je voudrais que tu laisses mon enveloppe charnel dans mon refuge, elle y sera en sécurité, mais je veux que tu plantes ce gland dans une forêt splendide et paisible pour que mon âme puisse s'élever vers le ciel au même rythme que la croissance de ce chêne. Le gland est le symbole de la vie Nelrine, un symbole d'immortalité. Je te fais confiance pour trouver cette forêt et, surtout, prends le temps qu'il te faut afin d'avoir la certitude que c'est bien le bon endroit. "
Je passai les jours suivants à veiller sur lui. Un soir, je pris sa main dans la mienne et je lui donnai un baiser sur son front marqué par les rides. C'est à ce moment qu'il me fit le plus beau sourire qui soit en me regardant de ses yeux étincelants et en me disant : " Prends soin de mon âme Nelrine." Ses paupières se fermèrent tranquillement et sa respiration cessa. Je restai allongée auprès de lui toute la nuit en pleurant.
Le lendemain matin, je fis mon sac et je partis. Je laissai son corps là où son âme l'avait quitté, comme il me l'avait demandé. La petite pochette en tissu rouge contenant le gland était précieusement enfouie dans la besace accrochée à ma ceinture. J'avais décidé de quitter cette forêt.
Je voyageai pendant plusieurs années et, un jour, je fis la connaissance d'un groupe d'humains prônant le respect de la nature comme moi et qui s'affichaient sous le nom de la guilde de Gaïa. Je fus très intéressée par eux et, après les avoir longuement observés, je me suis jointe à leur groupe. J'étais la seule elfe parmi eux; rien de surprenant dans ce choix d'aller vers eux puisque tous mes souvenirs je les ai vécu parmi les humains. D'ailleurs, ces gens aimables ignorèrent mon origine elfique jusqu'au jour où je me rendis compte que d'autres elfes habitaient sur ces terres et que je ne fus plus mal à l'aise de montrer mes oreilles.
Je gagnai leur confiance et ils me nommèrent représentante de la guilde. Responsabilité que j'acceptai et que je mène du mieux que je le peux encore aujourd'hui. Je me dois d'être neutre et impartiale dans les choix qui se présentent à nous et je me dois aussi de leur apporter toutes les informations nécessaires pour faire ces choix.
Notre vie était paisible dans le village de Forélia, jusqu'à ce que Gildor et Gideon soit choisi pour représenter l'élément de l'air dans la communauté de l'orbe et disparaissent tous deux avec les six autres membres de cette communauté ainsi que Setoh. Mon intuition me dicta de tout faire pour les retrouver et je partis pour l'aventure avec d'autres gens qui recherchaient eux aussi leurs amis disparus.
C'est ce voyage qui fit jaillir en moi le goût des mots et amorça ma recherche de la connaissance par l'écriture d'un journal que j'ai pris soin de nourrir de descriptions, de dialogues, de réflexions et de questionnements. Questionnements pour lesquels j'essais de trouver les réponses en partageant mes connaissances et en cherchant à en acquérir de nouvelles.
De la discussion jaillit la lumière !
Je suis une elfe à la recherche de son identité et de ses origines.
Je suis une druide dévouée à la protection de la nature et à l'équilibre.
Je suis une femme en quête de connaissances afin de mieux comprendre le monde qui l'entoure.